Société européenne de culture
Identity Area
Société européenne de culture ; Privés notamment famille Campagnolo.
Description Area
La Société européenne de culture est fondée en 1950 à Venise par le juriste et philosophe italien Umberto Campagnolo.
Ce dernier, né à Este en 1904, obtient un diplôme de comptable, son baccalauréat de lettres classiques puis sa licence de philosophie à l'université di Padoue (1931). Après avoir enseigné au lycée de la ville (1931-1933), il quitte l'Italie fasciste pour la Suisse (1933-1941). Inscrit à l'Institut universitaire de hautes études internationales à l’université de Genève, il devient docteur en sciences politiques (1937) et se voit habilité à y professer la philosophie du droit (1939). Nouant en particulier des liens avec les professeurs Hans Kelsen et Guglielmo Ferrero, il inaugure sa carrière internationale d’auteur scientifique, bientôt engagé, en publiant de nombreux articles concernant notamment la question de la paix dans ses fondements philosophiques et juridiques.
1941 marque le retour d'Umberto Campagnolo dans la péninsule. Il rejoint l'entreprise fondée à Ivrea par les industriels activement philanthropes et fédéralistes, Adriano et Massimo Olivetti, dont il a fait connaissance en terre helvétique. Chargé des relations publiques, il collabore à la fondation de la bibliothèque de l'établissement et au lancement des 'Nuove Edizioni di Ivrea' qui deviennent par la suite les fameuses 'Edizioni di Comunità'. Il professe en parallèle Histoire des doctrines politiques, rebaptisée en 1963 Philosophie de la politique, à l'université de Padoue (1943-1974) ainsi qu’Histoire de la philosophie à l'université de Venise (1950-1974).
En 1945, Umberto Campagnolo quitte l'Olivetti suite à sa nomination comme commissaire de l'Istituto per gli Studi di Politica Internazionale (ISPI) à Milan. Durant cette période, il prolonge ses réflexions et cherchant à s'investir concrètement, assume le secrétariat général national du Movimento Federalista Europeo (1945-1946). Il démissionne rapidement en raison de son désaccord sur les modalités du combat et la conception-même d’Europe unie, ancrée selon lui hors du tout-politique.
C’est durant sa participation aux Rencontres internationales de Genève en 1946 que naît son projet d’une association solidaire, voire militante, des hommes de culture, expression qu'il privilégie à celle d'intellectuels, à son sens enfermés dans leurs tours d'ivoire. Il s'agit de promouvoir sur le continent et au-delà, une paix vraie qui ne soit pas seulement une alternative à la guerre : le monde à peine sorti d’un conflit apocalyptique avec ses millions de morts et marqué par l’innovation tragique de l’arme atomique fait désormais face aux menaces de la Guerre froide.
La Société européenne de culture voit ainsi le jour en 1950 à Venise dans la région natale de son promoteur mais aussi à la charnière entre l’Ouest et l’Est. Les adhésions proviennent d’horizons géographiques, disciplinaires et idéologiques variés. Toutes émanent de personnalités de bonne volonté, animées d’un esprit humaniste et ouvertes, selon le principe de la Société, à un dialogue culturel autonome tout azimut en quête de la paix. Sous l'égide de la plume, du pinceau ou de la clé musicale, les noms se multiplient et rivalisent de prestige. Parmi les passagers d'un jour ou voyageurs au long cours, l'on compte Benedetto Croce, Giuseppe Ungaretti, Eugenio Montale, Salvatore Quasimodo, Marc Chagall, André Gide, François Mauriac, Jean-Paul Sartre, Pablo Picasso, Léopold Sedar Senghor, Le Corbusier, Carl Jung, Arthur Honegger, Albert Schweitzer, Frédéric et Irène Joliot-Curie, Alfred Kastler, Thomas Mann, Theodor Adorno, Pablo Casals, Eugenio d’Ors, Odysseus Elytis, Pablo Neruda, György Lukács, Ilya Ehrenburg, Boris Pasternak…
Umberto Campagnolo est élu secrétaire général de l’association et dirige sa revue portant le titre emblématique : « Comprendre ». Convaincu de la valeur morale et politique de la culture, il se fait le porte-étendard de la "politique de la culture", voire "culturaliste", comme porteuse de valeurs à l’encontre de la crise, comme médiatrice entre absolu universel et Histoire, comme passerelle entre conscience individuelle et engagement civique. Il sera le guide indéfectible de la Société jusqu’à son décès en 1976.
Son épouse Michelle Bouvier Campagnolo relève alors ses fonctions. Il faut noter à ses côtés le philosophe Norberto Bobbio qui reprend la direction de "Comprendre", l'historien Giuseppe Galasso, le politologue Arrigo Levi et le linguiste Vincenzo Cappelletti. La Société connaît d’importants succès notamment en direction de l'Europe de l'Est et centre-orientale comme le prouve la présence de Bronislaw Geremek et ce, malgré les péripéties philosophiques et administratives que l'association continue de traverser. Les difficultés financières, le déficit de relais générationnel ainsi que les évolutions sociétales finissent toutefois par faire sentir leurs effets durant le nouveau millénaire. Le décès de Michelle Campagnolo Bouvier en 2011 ouvre la voie à un nouveau chapitre.
Catherine Previti Allaire, 11/2021
Relations Area
Société européenne de culture
Identity Area
Société européenne de culture ; Privés notamment famille Campagnolo.
Description Area
La Société européenne de culture est fondée en 1950 à Venise par le juriste et philosophe italien Umberto Campagnolo.
Ce dernier, né à Este en 1904, obtient un diplôme de comptable, son baccalauréat de lettres classiques puis sa licence de philosophie à l'université di Padoue (1931). Après avoir enseigné au lycée de la ville (1931-1933), il quitte l'Italie fasciste pour la Suisse (1933-1941). Inscrit à l'Institut universitaire de hautes études internationales à l’université de Genève, il devient docteur en sciences politiques (1937) et se voit habilité à y professer la philosophie du droit (1939). Nouant en particulier des liens avec les professeurs Hans Kelsen et Guglielmo Ferrero, il inaugure sa carrière internationale d’auteur scientifique, bientôt engagé, en publiant de nombreux articles concernant notamment la question de la paix dans ses fondements philosophiques et juridiques.
1941 marque le retour d'Umberto Campagnolo dans la péninsule. Il rejoint l'entreprise fondée à Ivrea par les industriels activement philanthropes et fédéralistes, Adriano et Massimo Olivetti, dont il a fait connaissance en terre helvétique. Chargé des relations publiques, il collabore à la fondation de la bibliothèque de l'établissement et au lancement des 'Nuove Edizioni di Ivrea' qui deviennent par la suite les fameuses 'Edizioni di Comunità'. Il professe en parallèle Histoire des doctrines politiques, rebaptisée en 1963 Philosophie de la politique, à l'université de Padoue (1943-1974) ainsi qu’Histoire de la philosophie à l'université de Venise (1950-1974).
En 1945, Umberto Campagnolo quitte l'Olivetti suite à sa nomination comme commissaire de l'Istituto per gli Studi di Politica Internazionale (ISPI) à Milan. Durant cette période, il prolonge ses réflexions et cherchant à s'investir concrètement, assume le secrétariat général national du Movimento Federalista Europeo (1945-1946). Il démissionne rapidement en raison de son désaccord sur les modalités du combat et la conception-même d’Europe unie, ancrée selon lui hors du tout-politique.
C’est durant sa participation aux Rencontres internationales de Genève en 1946 que naît son projet d’une association solidaire, voire militante, des hommes de culture, expression qu'il privilégie à celle d'intellectuels, à son sens enfermés dans leurs tours d'ivoire. Il s'agit de promouvoir sur le continent et au-delà, une paix vraie qui ne soit pas seulement une alternative à la guerre : le monde à peine sorti d’un conflit apocalyptique avec ses millions de morts et marqué par l’innovation tragique de l’arme atomique fait désormais face aux menaces de la Guerre froide.
La Société européenne de culture voit ainsi le jour en 1950 à Venise dans la région natale de son promoteur mais aussi à la charnière entre l’Ouest et l’Est. Les adhésions proviennent d’horizons géographiques, disciplinaires et idéologiques variés. Toutes émanent de personnalités de bonne volonté, animées d’un esprit humaniste et ouvertes, selon le principe de la Société, à un dialogue culturel autonome tout azimut en quête de la paix. Sous l'égide de la plume, du pinceau ou de la clé musicale, les noms se multiplient et rivalisent de prestige. Parmi les passagers d'un jour ou voyageurs au long cours, l'on compte Benedetto Croce, Giuseppe Ungaretti, Eugenio Montale, Salvatore Quasimodo, Marc Chagall, André Gide, François Mauriac, Jean-Paul Sartre, Pablo Picasso, Léopold Sedar Senghor, Le Corbusier, Carl Jung, Arthur Honegger, Albert Schweitzer, Frédéric et Irène Joliot-Curie, Alfred Kastler, Thomas Mann, Theodor Adorno, Pablo Casals, Eugenio d’Ors, Odysseus Elytis, Pablo Neruda, György Lukács, Ilya Ehrenburg, Boris Pasternak…
Umberto Campagnolo est élu secrétaire général de l’association et dirige sa revue portant le titre emblématique : « Comprendre ». Convaincu de la valeur morale et politique de la culture, il se fait le porte-étendard de la "politique de la culture", voire "culturaliste", comme porteuse de valeurs à l’encontre de la crise, comme médiatrice entre absolu universel et Histoire, comme passerelle entre conscience individuelle et engagement civique. Il sera le guide indéfectible de la Société jusqu’à son décès en 1976.
Son épouse Michelle Bouvier Campagnolo relève alors ses fonctions. Il faut noter à ses côtés le philosophe Norberto Bobbio qui reprend la direction de "Comprendre", l'historien Giuseppe Galasso, le politologue Arrigo Levi et le linguiste Vincenzo Cappelletti. La Société connaît d’importants succès notamment en direction de l'Europe de l'Est et centre-orientale comme le prouve la présence de Bronislaw Geremek et ce, malgré les péripéties philosophiques et administratives que l'association continue de traverser. Les difficultés financières, le déficit de relais générationnel ainsi que les évolutions sociétales finissent toutefois par faire sentir leurs effets durant le nouveau millénaire. Le décès de Michelle Campagnolo Bouvier en 2011 ouvre la voie à un nouveau chapitre.
Catherine Previti Allaire, 11/2021